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Entre le 19 et le 25 août 1944 : quand Paris brisa ses chaînes

Il y a 60 ans, entre le 19 et le 25 août 1944: quand Paris brisa ses chaînes

 

PAR INGRID ROUSSEAU

Canadian Press
Friday, August 20, 2004
 

PARIS (AP) - Paris, août 1944. Depuis quatre ans, la ville est "le remords du monde libre", selon le général Charles de Gaulle. Après le Débarquement en Normandie, la capitale attend sa libération avec impatience. Mais celle-ci n'est pas un objectif stratégique pour les Alliés.

 

La Résistance s'organise alors et, entre le 19 août, début de l'insurrection avec la prise de la préfecture de police, et le 25, date de la reddition allemande, une semaine décisive va s'écouler.

 

Après l'arrivée des troupes alliées en Normandie, le 6 juin, la tension monte. Le 14 juillet, plus de 100 000 personnes descendent dans la rue en chantant "La Marseillaise". Le 10 août, les cheminots déclenchent la grève générale. Ils sont rapidement suivis par la police, les postiers et les infirmiers. Progressivement, la capitale est paralysée: le charbon manque et les coupures d'électricité sont fréquentes. Sur les étals, c'est la pénurie de viande.

 

Mais les Alliés campent sur leur position: hors de question de libérer la capitale. Craignant les combats de rue et une pénurie de ravitaillement, ils prévoient de contourner la capitale par Mantes, au nord, et Melun, au sud.

 

Dans le camp allemand, un nouveau chef est chargé à partir du 9 août du commandement du Gross Paris: il s'agit du général Dietrich von Choltitz. Celui qui s'est distingué au siège de Sébastopol, en juillet 1942, dispose alors de troupes de sécurité constituées de quatre régiments de soldats âgés. On lui affecte un détachement de 17 chars de la division PanzerLehr et des batteries de défense anti-aérienne.

 

Pendant ce temps, la répression continue: le 16 août, 35 jeunes résistants sont massacrés par les Allemands au Bois de Boulogne, sept autres sont fusillés dans le 16e arrondissement. Le lendemain, le consul de Suède, Raoul Nordling, signe un accord relatif à la libération de 3000 détenus politiques. Mais pour la plupart d'entre eux, il arrive trop tard: le dernier convoi de déportés part de Drancy le jour même. Puis, c'est l'appel à la mobilisation générale du colonel Henri Rol-Tanguy, commandant des Forces françaises de l'Intérieur en Ile-de-France, et des élus communistes.

 

Dès le 19 au matin, quelque 3000 policiers occupent la préfecture de police. Pour la première fois depuis quatre ans, le drapeau tricolore flotte sur le bâtiment. Les premières fusillades éclatent. L'un après l'autre, les mairies d'arrondissement, l'Elysée, Matignon et d'autres ministères tombent aux mains de la Résistance. Nordling négocie alors une trêve avec Von Choltitz. Mais ce cessez-le-feu, controversé dès le départ, est peu respecté.

 

Dès le lendemain, De Gaulle intervient auprès du général Eisenhower pour qu'il envoie la 2e Division blindée (DB), dirigée par le général Philippe Leclerc, sur Paris. C'est non, lui répond le commandant suprême des forces alliées, qui lui avait promis, en décembre 1943, que les Français seraient les premiers à entrer dans la capitale. Malgré ce nouveau refus, Leclerc décide d'envoyer un détachement en direction de la capitale. Le 22, il sera finalement autorisé à foncer sur Paris, avec l'appui de la 4e Division d'infanterie américaine.

 

Pendant ce temps, l'insurrection se poursuit dans la capitale. Ordre est lancé de dresser des barricades. Objectif: empêcher la circulation des soldats allemands. En quelques heures, la ville se couvre d'obstacles. De son côté, le commandant du Gross Paris reçoit l'ordre d'Hitler de détruire la capitale: elle "doit être réduite en un monceau de ruines". Von Choltitz hésite. Ces destructions n'auront finalement pas lieu.

 

Le 24 au soir, la colonne du capitaine Raymond Dronne, de la 2e DB, arrive à l'Hôtel de Ville. Paris est en liesse. Les cloches sonnent. Elles n'avaient pas retenti depuis quatre ans. Leclerc entre dans la capitale le lendemain et installe son PC à la gare Montparnasse. Les forces allemandes sont alors concentrées autour de quelques points d'appui, et notamment l'hôtel Meurice, siège du Gross Paris.

 

Assiégé par la 2e DB, Von Choltitz se rend et signe l'acte de reddition à la préfecture de police. Il est ensuite emmené à Montparnasse, où il signe une vingtaine de cessez-le-feu. Il est un peu moins de 17 h, ce vendredi 25 août, lorsque Leclerc accueille, avec le colonel Rol-Tanguy, le général de Gaulle. Ce dernier se rend ensuite à l'hôtel de ville, où il prononce un discours historique: "Paris outragé", finalement "libéré par son peuple, avec le concours des armées de la France"...

 

Le lendemain, le chef de la France combattante défile sur les Champs-Elysées. Un défilé émaillé d'une fusillade, provenant de la cathédrale Notre-Dame. De son côté, la 2e DB contient la contre-attaque allemande. Du dimanche 27 au mercredi 30, elle sera chargée de repousser l'ennemi au Bourget.

Les paroles du "Chant des partisans"

PARIS (AP) - Voici les paroles du "Chant des partisans", de Joseph Kessel:

"Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur la plaine?
Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu'on enchaîne?
Ohé partisans, ouvriers, paysans, c'est l'alarme!
Ce soir l'ennemi connaîtra le prix du sang et des larmes.
Montez de la mine, descendez des collines, camarades,
Sortez de la paille les fusils, la mitraille, les grenades;
Ohé les tueurs, à la balle ou au couteau tuez vite!
Ohé saboteur, attention à ton fardeau dynamite!
C'est nous qui brisons les barreaux des prisons, pour nos frères,
La haine à nos trousses, et la faim qui nous pousse, la misère.
Il y a des pays où les gens au creux des lits font des rêves
Ici, nous, vois-tu, nous on marche et nous on tue, nous on crève
Oui on crève
Ici chacun sait ce qu'il veut, ce qu'il fait quand il passe;
Ami, si tu tombes, un ami sort de l'ombre à ta place.
Demain du sang noir séchera au grand soleil sur les routes
Chantez, compagnons, dans la nuit la liberté nous écoute
Chantez, allez chantez, chantez compagnons."
© Copyright 2004 The Canadian Press

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